ÉDITORIAL | Hypertrucages et infox multimodaux : l’IA, mais pas que!

Un éditorial de Chloé-Anne Touma, rédactrice en chef de LES CONNECTEURS | Publié le 12 avril 2025
Le dernier numéro de LES CONNECTEURS consacré à la désinformation sort quelques jours après le 1er avril, cette journée où tout le monde, même les esprits critiques les plus affûtés, semble se donner congé de la vérité. Une cascade de poissons d’avril, parfois brillants, parfois douteux, s’est déversée sur nos écrans, issus d’entreprises respectables, de scientifiques, même d’experts qui ont pour habitude de lutter contre la désinformation! Tous prouvant, sans même recourir à l’intelligence artificielle, à quel point la supercherie amuse et s’infiltre sans effort dans notre quotidien.
les GAFAM au cœur de la désinformation multimodale
Mais au-delà du jeu, il y a la guerre. Celle que mènent les puissances politiques et industrielles du numérique contre la vérité. L’ère de la propagande de Trump n’a rien inventé, mais elle a perfectionné l’art de noyer les faits sous une avalanche de mensonges stratégiques. Pendant ce temps, les GAFAM règnent en maîtres, dictant leurs propres règles sur ce que nous voyons, croyons, partageons. Aux États-Unis, les diffuseurs traditionnels comme la chaîne de télé à grande portée Fox News, sont réquisitionnés tels des véhicules de cette propagande.
« Pendant que nos médias canadiens sont bannis des échanges pseudo-démocratiques (…) c’est une orgie de contenus biaisés, erronés et nocifs, renforcée par les nouvelles politiques de Meta, Google et X, qui a pris leur place. »
Et pendant ce temps, du côté de nos dirigeants canadiens? Un silence assourdissant. Ceux-là mêmes qui, en nous jetant dans la tourmente de la Loi C-18, infructueuse voire dommageable pour beaucoup de petits médias numériques, n’ont pas un mot à dire sur la désinformation en pleine campagne électorale. Pendant que nos médias canadiens sont bannis des échanges pseudo-démocratiques sur des plateformes comme Facebook, encore largement sollicitées, et attendent des redevances ou une solution de rechange pour leur modèle d’affaires, c’est une orgie de contenus biaisés, erronés et nocifs, renforcée par les nouvelles politiques de Meta, Google et X, qui a pris leur place.
Heureusement, l’ensemble de la population commence à s’y intéresser, ouvrant les yeux sur l’importance de diversifier ses sources d’information. L’industrie des médias traditionnels et du divertissement se penche quant à elle davantage sur la menace que représentent les nouvelles technologies en matière de fraude et de manipulation de masse. La nouvelle série québécoise « L’indétectable » en est un exemple d’actualité : un deepfake utilisé pour saboter la campagne électorale d’une candidate aux élections provinciales interprétée par Lynda Johnson.
Dans ce numéro issu d’une collaboration spéciale avec le Centre de recherche informatique de Montréal (CRIM) et ses chercheurs, nous vous proposons d’explorer cette nouvelle ère du mensonge industriel, de sorte à mieux vous outiller pour y faire face. Comment l’IA, le deepfake, les réseaux sociaux et les algorithmes façonnent-ils un monde où la vérité devient un mirage? Comment reprendre le contrôle? C’est à ces questions urgentes que nous tentons de répondre, à travers des reportages, chroniques, entrevues, ainsi que la couverture de plusieurs tables rondes tenues à même les locaux du CRIM, lors d’un grand rendez-vous sur la désinformation organisé en partenariat avec LES CONNECTEURS.
Parce que si le 1er avril est derrière nous, l’illusion, elle, ne prend jamais fin.
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