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Phare de l’économie et de l’environnement de la province et du pays, l’industrie forestière fait face à des enjeux complexes. En transformation pour y répondre, le secteur innove également pour saisir des opportunités en matière de productivité, de développement durable et de coopération entre communautés. Notre rédaction s’entretient avec Quentin Hibon, directeur du développement des affaires chez Mitacs, pour dresser le portrait des défis forestiers et des projets innovants qui s’y attardent.
En tant qu’organisme sans but lucratif, dont le financement est assuré, entre autres, par les gouvernements du Canada et de plusieurs provinces dont celle du Québec, et en partenariat avec les universités et le secteur privé, Mitacs aide à relever les défis auxquels sont confrontés les industries en innovation, comme le milieu forestier, grâce à la création d’investissements et de stages rémunérés, mobilisant des expertises prisées et essentielles. « Depuis 2017, nous avons investi un peu plus de 37 millions de dollars dans le secteur forestier, en soutenant les projets de 365 organisations, dont une majorité d’entreprises (plus ou moins 60 %) et d’OBNL (entre 35 et 40 %), sans compter les sociétés d’État comme la Sépaq (Société des établissements de plein air du Québec) », explique l’expert de Mitacs, bien au fait des nouvelles réalités du marché.
« Depuis 2017, nous avons investi un peu plus de 37 millions de dollars dans le secteur forestier, en soutenant les projets de 365 organisations (…) C’est un gros secteur, très actif, dans lequel il y a beaucoup d’innovation, parfois même insoupçonnée, en développement durable. »
– Quentin Hibon, directeur du développement des affaires chez Mitacs
« C’est un gros secteur, très actif, dans lequel il y a beaucoup d’innovation, parfois même insoupçonnée, en développement durable », observe M. Hibon, soulignant au passage que malgré sa « mauvaise presse », l’exploitation forestière représente « une part minime de l’utilisation des forêts ».
Quelques faits saillants issus des recherches de la rédaction pour appuyer ce propos :
« Les insectes abîment 5 % des forêts. On est à moins de 1 % avec l’exploitation forestière. N’empêche, il faut maintenir des orientations pro-durabilité », complète Quentin Hibon. Cela passe notamment par le recours aux pratiques émergentes reliées aux nouvelles technologies, comme les systèmes d’intelligence artificielle (IA) et les drones, pour collecter un maximum de données visant à optimiser la gestion des forêts, mieux cartographier les territoires et reliefs, et analyser l’évolution des écosystèmes en fonction de différents facteurs internes et externes à l’exploitation forestière. Des domaines de recherche et d’innovation technologique qui requièrent souvent différentes expertises, et le soutien de Mitacs.
Illustrant l’innovation technologique dont fait preuve l’industrie, au profit de l’efficacité et de la durabilité, M. Hibon mentionne plusieurs projets soutenus par Mitacs, dont une initiative en foresterie de précision menée par l’Institut de recherche sur les feuillus nordiques (IRFN), en collaboration avec des compagnies forestières au Nouveau-Brunswick, qui explore l’utilisation avancée de la technologie LiDAR montée sur drones (ULS), et de LiDAR terrestres mobiles (MLS).
Ce projet vise à développer des techniques automatisées pour estimer avec précision les attributs forestiers, à partir de nuages de points à très haute densité. En d’autres mots, il rend la gestion des forêts plus précise, efficace et respectueuse de l’environnement, en reposant sur des technologies modernes qui permettent de mieux cartographier, comprendre et protéger les ressources forestières. C’est un peu comme si l’on prenait une photo en trois dimensions de chaque arbre, mais avec beaucoup plus de détails.
L’objectif est de surmonter les limitations des méthodes actuelles, particulièrement dans l’identification des arbres de haute qualité dans des forêts complexes. Cela implique de développer des programmes informatiques pour identifier chaque arbre séparément, et mesurer ses caractéristiques importantes. Les résultats sont ensuite comparés avec des mesures prises manuellement dans une vingtaine de zones de forêt choisies. L’équipe crée ensuite un guide pratique, fondé sur le fruit de son étude, qui permet de mieux zoner et gérer les aires forestières.
Cette nouvelle façon de faire permet d’améliorer à la fois la récolte du bois et la protection des forêts, ce qui représente un grand pas en avant pour la gestion durable des forêts à long terme.

Toujours en matière de durabilité, un autre projet, baptisé « PINEFIRE », vise à élaborer une stratégie de gestion durable des forêts basée sur les écosystèmes. Mené en collaboration avec le Parc National d’Aiguebelle, le Centre d’enseignement et de recherche en foresterie de Ste Foy, la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU), le Parc National d’Opémican et diverses institutions de recherche forestière, ce projet se concentre sur la préservation des forêts mixtes et des forêts pures de pins blancs et rouges dans le nord de leur aire de répartition.
L’approche innovante de PINEFIRE consiste à reproduire les perturbations naturelles que connaît déjà la forêt, en les transposant dans la gestion commerciale. Les chercheurs étudient comment les petits feux qui brûlent au sol affectent la repousse des arbres, puis comparent les plantes, qui poussent dans les zones brûlées, non brûlées et celles gérées par l’homme. Ils explorent également l’utilisation de feux contrôlés pour restaurer les forêts. Le projet évalue aussi l’impact de menaces spécifiques, comme la rouille vésiculeuse du pin blanc et la tordeuse des bourgeons de l’épinette sur la régénération naturelle et la composition des peuplements, intégrant ainsi les défis phytosanitaires dans la stratégie globale de gestion forestière.
En outre, PINEFIRE analyse l’impact historique des incendies et des récoltes forestières sur l’évolution de la composition et de la structure des forêts, en comparant les effets des transformations naturelles à ceux des changements provoqués. Bien que sa méthode ne soit pas courante, elle pourrait aider à comprendre et gérer les forêts de manière plus durable à long terme.
Offrant un programme dédié aux partenariats innovants avec les communautés autochtones, qui permet le financement d’étudiants qui en sont issus, ou d’organisations gérés par des autochtones, à hauteurs respectives de 75 et 50 %, Mitacs facilite ainsi la collaboration avec des talents autochtones pour mener des projets de recherche et développement (R-D) et d’innovation, comme celui intitulé « Développement du dialogue entre la recherche scientifique et les savoirs autochtones sur la forêt boréale », auquel collaborent la Première Nation Abitibiwinni et divers organismes de recherche.
« Beaucoup de projets d’innovation (…) impliquent l’innovation autochtone, et des professeurs universitaires, ce qui permet vraiment d’instaurer le dialogue. »
– Quentin Hibon, directeur du développement des affaires chez Mitacs
Son objectif principal est de renforcer le dialogue entre la science environnementale et les connaissances autochtones concernant la forêt boréale. Ce projet se décline en trois volets : l’utilisation de l’ADN environnemental pour surveiller les changements de biodiversité, la conciliation des valeurs autochtones et industrielles dans la protection du caribou forestier, et le développement de matériel pédagogique visant à susciter l’intérêt des jeunes autochtones pour les sciences naturelles. Parmi les résultats notables qui en émanent, on compte la création d’une base de données sur la biodiversité du bassin versant de la rivière Harricana, une approche multi-critères pour la gestion forestière, ainsi que des outils pédagogiques innovants diffusés dans les écoles locales.
« Beaucoup de projets d’innovation comme celui-ci impliquent l’innovation autochtone, et des professeurs universitaires, ce qui permet vraiment d’instaurer le dialogue », soutient M. Hibon.
En matière de visées relatives au développement durable, au-delà de celles relevant de l’exploitation de la forêt et du fait de minimiser l’impact environnemental, l’une des priorités de l’industrie est celle d’optimiser les matériaux liés au bois pour les rendre plus écoénergétiques. « Il y a une recherche, une tendance à vouloir rendre les bâtiments plus écoénergétiques, et le bois y répond! », rappelle Quentin Hibon, faisant référence aux propriétés du bois, qui offrent des avantages en termes d’isolation, de réduction des émissions de carbone, d’efficacité énergétique tout au long de son cycle de vie, et de flexibilité. « L’enjeu se mesure surtout au besoin de produire des matériaux plus résistants et adaptables à certaines situations. »
Enfin, si l’IA fait partie des nouvelles priorités de développement, la prochaine révolution sera celle du quantique, à surveiller de près selon l’expert de Mitacs. « Nous mettons des efforts dans le développement des affaires, là où il y a une grande demande, comme le marché de l’IA, pour lequel nous recevons souvent des subventions – nous en aurons sûrement dans le quantique. De là, nous rencontrons les entreprises qui peuvent travailler dans le secteur ciblé, IA ou quantique, et qui peuvent essayer de mieux comprendre le marché, car une entreprise qui travaille dans le quantique n’en a pas nécessairement fait sa spécialité. Il peut s’agir d’une banque qui veut optimiser ses processus, par exemple. Notre démarche de développement est en phase avec les priorités du gouvernement. »
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